[3111] L’épître de Manuel Chrysoloras à l’empereur Jean Paléologue ne blessera point des yeux ni des oreilles adonnés à l’étude de l’antiquité (ad calcem Codini, de Antiquitatitus C. P., 107-126) ; la suscription prouve que Jean Paléologue fut associé à l’empire avant l’année 1441, époque de la mort de Chrysoloras. L’âge de ses deux plus jeunes fils, Démétrius et Thomas, l’un et l’autre Porphyrogénètes, indique une date encore plus ancienne, au moins l’année 1408. Ducange, Fam. Byzant., p. 224-247.

[3112] Un écrivain a observé qu’on pouvait naviguer autour de la ville d’Athènes. Mais ce qui peut être vrai, rhétoriquement parlant, de la ville de Constantinople, ne convient point à celle d’Athènes, située à cinq milles de la mer, et qui n’est ni environnée ni traversée par des canaux navigables.

[3113] Nicéphore Grégoras a décrit le colosse de Justinien (l. VII, 12) ; mais ses dimensions sont fausses et contradictoires. L’éditeur Boivin a consulté son ami Girardon, et le sculpteur lui a donné les justes proportions d’une statue équestre. Pierre Gyllius a encore vu celle de Justinien : elle n’était plus sur une colonne, mais dans la cour extérieure du sérail. Il était à Constantinople lorsqu’on la fondit et qu’on la convertit en une pièce de canon (de Topograph. C. P., l. II, c. 17).

[3114] Voyez les ruines et les réparations de Sainte-Sophie dans Grégoras (l. VII, 12 ; l. XV, 2). Andronic la fit étayer en 1317, et la partie orientale du dôme s’écroula en 1345. Les Grecs exaltent avec la pompe ordinaire de leur style la sainteté et la magnificence de ce paradis terrestre, le séjour des anges et de Dieu lui-même, etc.

[3115] D’après le récit original et sincère de Syropulus (p. 312-351), le schisme des Grecs s’annonça dès la première fois qu’ils officièrent à Venise, et fut confirmé par l’opposition générale du clergé et du peuple de Constantinople.

[3116] Relativement au schisme de Constantinople, voyez Phranza (l. II, c. 17), Laonicus Chalcocondyles (l. VI, p. 155, 156) et Ducas (c. 31). Le dernier s’exprime avec franchise et liberté. Parmi les modernes, on peut distinguer le continuateur de Fleury (t. XXII, p. 338, etc., 401, 402, etc.) et Spondanus (A. D. 1440, n° 30). Dès qu’il est question de Rome et de la religion, le bon sens du dernier se noie dans une mer de préjugés et de préventions.

[3117] Isidore était métropolitain de Kiow ; mais les Grecs sujets de la Pologne ont transporté ce siège des ruines de Kiow à Lemberg ou Léopold (Herbestein, in Ramusio, t. II, p. 127) ; d’un autre côté, les Russes transportèrent leur obéissance spirituelle à l’archevêque, depuis 1588 patriarche de Moscou. Lévesque (Hist. de Russie, t. III, p. 188-190), extrait d’un manuscrit de Turin, Iter et labores archiepiscopi Arsenii.

[3118] Le curieux récit de Lévesque (Hist. de Russie, t. II, P. 342-347) est extrait des archives du patriarcat. Les événements de Ferrare et de Florence y sont décrits avec autant de partialité que d’ignorance ; mais on peut en croire les Russes relativement à leurs propres préjugés.

[3119] Le chamanisme, ou l’ancienne religion des chamans ou gymnosophistes, a été repoussé par la religion plus populaire des brames de l’Inde dans les déserts du Nord. Des philosophes qui allaient tout nus, furent obligés de s’envelopper dans des fourrures. Ils dégénérèrent à la longue en magiciens ou charlatans. Les Morvans ou Tchérémisses de la Russie européenne professent cette religion constituée d’après le modèle terrestre d’un roi ou dieu, de ses ministres ou anges, et des esprits rebelles qui contrarient son gouvernement. Comme ces tribus du Volga n’admettent point les images, elles pouvaient, avec beaucoup plus de justice, rétorquer sur les Latins le nom d’idolâtres due leur donnaient les missionnaires. Lévesque, Hist. des Peuples soumis à la domination des Russes, t. I, p. 194-237, 423-460.

[3120] Spondanus, Annal. ecclés., t. II, A. D. 1451, n° 13. L’épître des Grecs avec la traduction latine existe encore dans la bibliothèque du collège de Prague.

[3121] Voyez Cantemir, Hist. de l’Empire ottoman, p. 94. Murad ou Morad serait peut-être plus correct ; mais j’ai préféré le nom généralement connu à cette exactitude minutieuse, et très peu sûre lorsqu’il faut convertir des caractères orientaux en lettres romaines.

[3122] Voyez Chalcocondyles (l. VII, p. 186-198), Ducas (c. 23) et Marin Barletius, dans la Vie de Scanderbeg (p. 145, 146). Sa bonne foi pour la garnison de Sfetigrade fut un exemple et une leçon pour son fils Mahomet.

[3123] Voltaire (Essai sur l’Histoire générale, c. 89, p. 283, 284) admire le philosophe turc. Aurait-il fait le même éloge d’un prince chrétien qui se serait retiré dans un monastère ? Voltaire était à sa manière bigot et intolérant.

[3124] Voyez dans la Bibliothèque orientale de d’Herbelot les articles Derviche, fakir, Nasser, Rohbaniat. Cependant les écrivains arabes et persans ont traité superficiellement ce sujet, et c’est parmi les Turcs que ces espèces de moines se sont principalement multipliés.

[3125] Rycault (dans l’État présent de l’empire ottoman, p. 242-268) donne beaucoup de détails qu’il tira de ses conversations personnelles avec les principaux derviches, qui font, pour la plupart, remonter leur origine au règne d’Orchan. Il ne parle point des Zichides de Chalcocondyles (l. VII, p. 286), parmi lesquels se retira Amurath. Les Seids de cet auteur sont les descendants de Mahomet.

[3126] Dans l’année 1431, l’Allemagne leva quarante raille chevaux ou hommes d’armes pour faire la guerre aux hussites de la Bohême (Lenfant, Hist. du conc. de Bâle, t. I, p. 318). Au siège de Nuys sur le Rhin, en 1474, les princes, les prélats et les villes, envoyèrent chacun leur contingent ; et l’évêque de Munster, qui n’est pas des plus grands, fournit quatorze cents chevaux, six mille hommes d’infanterie, tous habillés de vert, et douze cents chariots. Les forces réunies du roi d’Angleterre et du duc de Bourgogne étaient à peine égales à un tiers de cette armée allemande (Mém. de Philippe de Comines, l. IV, c. 2). Les puissances de l’Allemagne entretiennent six ou sept cent mille soldats bien payés et admirablement disciplinés.

[3127] Ce ne fut qu’en 1444 que la France et l’Angleterre convinrent d’une trêve de quelques mois. Voyez les Fœdera de Rymer et les Chroniques des deux nations.

[3128] Pour la croisade de Hongrie, Spondanus (Ann. ecclés., A. D. 1443, 1444) m’a servi de guide. Il a lu avec soin et comparé en critique les écrits des Grecs et ceux des Ottomans, les historiens de Hongrie, de Pologne et de l’Occident. Son récit est clair, et lorsqu’il peut se dépouiller des préjugés religieux, son jugement n’est pas à mépriser.

[3129] J’ai supprimé dans le nom de Ladislas la lettre W, par laquelle la plupart des écrivains le commencent (Wladislas), soit pour se conformer à la prononciation polonaise, ou pour le distinguer de l’infant Ladislas d’Autriche son rival. Callimaque (l. I, part. II, p. 447-486), Bonfinius (Déc. III, l. IV), Spondanus et Lenfant, parlent en détail de leur concurrence pour le trône de Hongrie.

[3130] Les historiens grecs, Phranza, Chalcocondyles et Ducas, ne représentent point leur prince comme un personnage fort actif dans cette croisade ; il parait qu’après l’avoir sollicitée il la contraria par sa timidité.

[3131] Cantemir lui attribue l’honneur du plan, et cite sa lettre pressante au roi de Hongrie. Mais les puissances mahométanes sont rarement instruites des affaires de la chrétienté, et la situation des chevaliers de Rhodes, ainsi que leur correspondance, donnent lieu de croire qu’ils eurent part à ce plan du sultan de Caramanie.

[3132] Dans leurs lettres à l’empereur Frédéric III, les Hongrois tuèrent trente mille Turcs en une seule bataille. Mais le modeste Julien réduit le nombre des morts à six mille, ou même deux mille infidèles. Æneas Sylvius, in Europ., c. 5, et epist. 44-81, apud Spondanum.

[3133] Voyez l’origine de la guerre des Turcs et la première expédition de Ladislas, dans les cinquième et sixième livres de la troisième Décade de Bonfinius, qui imite avec assez de succès le style et la division de Tite Live. Callimaque (l. II, p. 487-496) est cependant plus pur et plus authentique.

[3134] Je ne prétends pas garantir l’exactitude littérale du discours de Julien, dont les expressions varient dans Callimaque (l. III, p. 505-507), dans Bonfinius (Décade III, p. 457, 458) et dans d’autres historiens, qui ont peut-être employé leur propre éloquence en faisant parler les orateurs de ce siècle : mais ils conviennent tous qu’il conseilla le parjure que les protestants ont censuré amèrement, et que les catholiques, découragés par la défaite de Warna, ont faiblement défendu.

[3135] Varnes ou Warna était, sous la dénomination grecque d’Odessus, une colonie de Milésiens, qui fut nommée ainsi en l’honneur d’Ulysse (Cellarius, t. I, p. 374 ; d’Anville, t. I, p. 312). Selon la description de l’Euxin, par Arrien (p. 24, 25, dans le premier vol. des Géographes d’Hudson), elle était située à dix-sept cent quarante stades de l’embouchure du Danube, à deux mille cent quarante de Byzance, et à trois cent soixante au nord du promontoire du mont Hémus, qui avance dans la mer.

[3136] Quelques auteurs chrétiens affirment qu’il tira de son sein une autre hostie que celle sur laquelle il avait juré d’observer le traité. Les musulmans supposent avec plus de simplicité un appel de leur souverain au prophète Jésus-Christ ; et cette opinion semble être celle de Callimaque (l. III, p. 56 ; Spondanus, A. D. 1444, n° 8).

[3137] Un critique judicieux croira difficilement à ces spolia opima d’un général victorieux, si rarement obtenues par la valeur, et si souvent inventées par l’adulation (Cantemir, p. 90, 91). Callimaque (l. III, p. 517) dit plus simplement et avec plus de vraisemblance : Supervenientibus janizaris, telorum multitudine non tam confossus est quam obrutus.

[3138] Outre quelques passages précieux d’Æneas Sylvius, soigneusement recueillis par Spondanus, nos meilleures autorités sont trois historiens du quinzième siècle, Philippe Callimaque (de Rebus a Wladislao Polonorum atque Hungarorum rege gestis, libri III, in Bell, scriptor. rer. hungar., t. I, p. 433-518), Bonfinius (Décad. III, l. V, p. 460-467) et Chalcocondyles (l. VII, p. 165-179). Les deux premiers étaient Italiens ; mais ils passèrent leur vie en Pologne, et en Hongrie (Fabricius, Bibl. lat. mediœ et infimæ ætatis, t. I, p. 324 ; Vossius, de Hist. lat., l. III, c. 8-11 ; Dictionnaire de Bayle, Bonfinius) ; voyez, pour le théâtre de la guerre au quinzième siècle, un petit Traité de Félix Petancius, chancelier de Segnie (ad talcem Cuspinian. de Cæsaribus, p. 716-722).

[3139] M. Lenfant nous a fait connaître l’origine du cardinal Julien (Hist. du concile de Bâle, p. 247, etc.) et ses campagnes de Bohême (p. 315, etc.). Spondanus et le continuateur de Fleury ont rapporté par occasion ses services à Bâle et à Ferrare, et sa fin malheureuse.

[3140] Syropulus fait un éloge généreux des talents d’un ennemi (p. 117).

[3141] Voyez Bonfinius (Décad. III, l. IV, p. 423). Comment les Italiens pouvaient-ils prononcer sans honte, ou le roi de Hongrie entendre sans rougir la flatterie ridicule qui confondait le nom d’un village de Valachie avec le surnom glorieux, mais accidentel, d’une branche de la famille Valérienne de l’ancienne Rome ?

[3142] Philippe de Comines (Mém., l. VI, c. 13) le cite sur l’autorité de la tradition du temps et en fait le plus brillant éloge, sous le nom singulier du chevalier Blanc de Valeigne (Valachia). Chalcocondyles et les annales turques de Leunclavius osent mettre en doute sa fidélité et sa valeur.

[3143] Voyez Bonfinius (Décad. III, l. VIII, p. 49) et Spondanus (A. D. 1456, n° 1-7). Huniades partagea la gloire de la défense de Belgrade avec Capistran, moine de l’ordre de Saint-François ; et dans leurs récits respectifs ni le saint ni le héros ne daignent parler du mérite de leur rival.

[3144] Voyez Bonfinius (Déc. III, l. VIII ; Déc. IV, l. VIII). Les observations de Spondanus sur le caractère et la vie de Mathias Corvin sont curieuses et d’une saine critique (A. D. 1464, n° 1 ; 1475, n° 6 ; 1476, n° 14-16 ; 1490, n° 4, 5). L’admiration de l’Italie était l’objet de son ambition. Pierre Tanzanus, Sicilien, a célébré ses exploits dans l’Épitomé rerum hungaricarum (p. 322-412). Galestus Martius de Narni a recueilli tous ses bons mots et ses sentences (p. 528-568) ; et nous avons une relation particulière de son mariage et de son couronnement. Ces trois ouvrages sont réunis dans le premier volume des Scriptores rerum hungaricarum de Bell.

[3145] Sir William Temple, dans son agréable Essai sur les vertus héroïques (vol. III, p. 385 de ses Œuvres), les place au nombre de sept chefs qui méritèrent la couronne sans la porter : Bélisaire, Narsès, Gonzalve de Cordoue, Guillaume Ier, prince d’Orange, Alexandre, duc de Parme, Jean Huniades et Georges Castriot ou Scanderbeg.

[3146] Je désirerais trouver quelques Mémoires simples et authentiques écrits par un ami de Scanderbeg, qui me représentassent le lieu, l’homme et les temps. La vieille histoire nationale de Marinus Barletius, prêtre de Scodra (de Vita moribus et rebus gestis Georgii Castrioti, etc., l. XIII, p. 367, Strab. 1537, in fol.), ne nous le laisse voir qu’empêtré dans un vêtement bizarre et chargé d’ornements mensongers. Voyez Chalcocondyles, l. VII, page 185 ; l. VIII, p. 229.

[3147] Marinus parle légèrement et avec répugnance de son éducation et de sa circoncision (l. I, p. 6, 7).

[3148] Si Scanderbeg mourut A. D. 1466, dans la soixante-troisième année de son âge (Marinus, l. XIII, p. 370), il naquit en 1403. S’il fut arraché à ses parents par les Turcs à l’âge de neuf ans, novennis (Marinus, l. I, p. 1-6), cet événement doit être arrivé en 1412, neuf ans avant l’avènement d’Amurath II au trône : ce prince hérita donc de l’esclave albanais, et n’en fit pas lui-même l’acquisition. Spondanus a relevé cette contradiction (A. D. 1341, n° 31 ; 1443, n° 1 4).

[3149] Marinus nous a heureusement instruits de ses revenus (l. II, p. 44).

[3150] Il y avait deux Dibras ; le supérieur et l’inférieur, l’un en Bulgarie et l’autre en Albanie. Le premier, à soixante-dix milles de Croya (l. V, p. 17), était contigu à la forteresse de Sfetigrade, dont les habitants refusèrent de boire l’eau d’un puits où l’on avait eu la perfidie de jeter un chien mort (l. V, p. 139, 140). Il nous manque une bonne carte de l’Épire.

[3151] Comparez le récit du Turc Cantemir avec la déclamation prolixe du prêtre albanais (l. IV, V et VI), qui a été copié par toute la séquelle des étrangers et des modernes.

[3152] En l’honneur de son héros, Barletius (l. VI, p. 188-i92) fait mourir le sultan sous les murs de Croya, de maladie à la vérité ; mais cette fable ridicule est anéantie par les Grecs et  les Turcs, qui conviennent unanimement de l’époque et des circonstances de la mort d’Amurath à Andrinople.

[3153] Voyez ses exploits dans la Calabre, neuvième et dixième livres de Marinus Barletius, auxquels ou peut opposer le témoignage ou le silence de Muratori (Ann. d’Ital., l. XIII, p. 291) et de ses auteurs originaux, Jean Simonetta (de Rebus Francisci Sfortiæ, in Muratori, Scriptor. rerum ital., t. XXI, p. 728, et alias). La cavalerie albanaise devint bientôt fameuse en Italie sous le nom de Stradiots (Mém. de Comines, l. VIII, c. 5).

[3154] Spondanus, d’après les meilleures autorités et les plus sages réflexions, a réduit le colosse de Scanderbeg à une taille ordinaire (A. D. 1461, n° 20 ; 1463, n° 9 ; 1465, n° 12, 13 ; 1467, n° 1). Ses propres lettres au pape et le témoignage de Phranza réfugié dans l’île de Corfou, voisine du lieu où il s’était retiré, démontrent sa détresse, que Marinus essaie gauchement de dissimuler. (l. X).

[3155] Voyez la famille des Castriot dans Ducange (Fam. dalmat., etc. XVIII, p. 348-350).

[3156] M. Swinburne (Voyage dans les Deux-Siciles, vol. V, p. 350-354) cite cette colonie d’Albanais.

[3157] La Chronique de Phranza est claire et authentique ; mais, au lieu de quatre ans et sept mois, Spondanus (A. D. 1445, n° 7) donne sept ou huit ans au règne du dernier Constantin ; il se fonde sur une lettre supposée d’Eugène IV au roi d’Éthiopie. 

[3158] Phranza (l. III, c. 1-6) mérite estime et confiance.

[3159] En supposant qu’il ait été pris en 1394, lorsque Timour fit sa première invasion en Géorgie (Sherefeddin, l. III, c. 50), il est possible qu’il ait suivi son maître tartare, dans l’Indoustan en 1398, et qu’il se soit embarqué de là pour les îles à épiceries.

[3160] Les heureux et vertueux Indiens vivaient au-delà de cent cinquante ans, et jouissaient des plus parfaites productions du règne végétal et du règne minéral ; les animaux étaient d’une taille colossale, des dragons de soixante-dix coudées, des fourmis longues de neuf pouces (formica indica), des moutons comme des éléphants, des éléphants comme des moutons. Quid libet audendi ? etc.

[3161] Il s’embarqua dans un vaisseau des îles aux épices, pour un des ports extérieurs de l’Inde, invenitque navem grandem ibericam qua in Portugalliam est delatus. Ce passage, écrit en 1477 (Phranza, l. III, c. 30), vingt ans avant la découverte du cap de Bonne-Espérance, est supposé ou miraculeux ; mais cette nouvelle géographie est entachée de l’erreur ancienne et absurde qui plaçait dans l’Inde les sources du Nil.

[3162] Cantemir, qui la nomme la fille de Lazare Ogli, et l’Hélène des Serviens, fixe l’époque de son mariage avec Amurath dans l’année 1424. On ne croira pas aisément que durant vingt-six années de cohabitation le sultan corpus ejus non tetigit. Après la prise de Constantinople elle se réfugia auprès de Mahomet II. Phranza, l. III, c. 22.

[3163] Le lecteur instruit se rappellera les offres d’Agamemnon (Iliade, I-V, 144) et l’usage général de l’antiquité.

[3164] Cantacuzène (j’ignore s’il était parent de l’empereur de ce nom) était grand-domestique, défenseur zélé du symbole grec, et frère de la reine de Servie, chez laquelle il fut envoyé en qualité d’ambassadeur. Syropulus, p. 37, 38-45.

[3165] Lorsqu’il s’agit du caractère de Mahomet II, il est dangereux de s’en rapporter entièrement soit aux Turcs, soit aux chrétiens. Le portrait le plus modéré qu’on en ait fait est celui de Phranza (l. I, c. 33), dont l’âge et la solitude avaient calmé le ressentiment. Voyez aussi Spondanus (A. D. 1451, n° 1), le continuateur de Fleury (t. XXII, p. 552), les Elogia de Paul Jove (l. III, p. 164, 166) et le Dictionnaire de Bayle (t. III, p. 272-279).

[3166] Cantemir (p. 115) et les mosquées qu’il fonda attestent son respect public pour la religion. Il disputa librement avec le patriarche Gennadius sur la religion grecque et la religion musulmane (Spondanus, A. D. 1453, n° 22).

[3167] Quinque linguas præter suam noverat ; græcam, latinam, chaldaïcam, persicam. L’auteur qui a traduit Phranza en latin a oublié l’arabe, que tous les musulmans étudiaient sans doute afin de lire le livre du prophète.

[3168] Philelphe demanda au vainqueur de Constantinople, dans une ode latine, la liberté de la mère et des sœurs de sa femme, et il obtint cette grâce. L’ode fut remise à Mahomet par les envoyés du duc de Milan. On soupçonnait Philelphe lui-même de vouloir se retirer à Constantinople ; cependant il a souvent cherché, par ses discours, à exciter à la guerre contre les musulmans (Voyez sa Vie par Lancelot, dans les Mém. de l’Acad. des Inscript., t. X, p. 718-721, etc.

[3169] Robert Valturio publia à Vérone, en 1483, ses douze livres de Re militari ; c’est le premier qui ait parlé de l’usage des bombes. Sigismond Malatesta, prince de Rimini, son protecteur, offrit cet ouvrage, avec une épître en latin, à Mahomet II.

[3170] Si l’on en croit Phranza, Mahomet II étudiait assidûment la vie et les actions d’Alexandre, d’Auguste, de Constantin et de Théodose. J’ai lu quelque part qu’on avait traduit par ses ordres les vies de Plutarque en langue turque. Si le sultan savait le grec, il destinait cette version à l’usage de ses sujets ; et cependant ces vies sont une école de liberté aussi bien que de valeur.

[3171] Le célèbre Gentile Bellino, qu’il avait fait venir de Venise, reçut de lui une chaîne et un collier d’or, avec une bourse de trois mille ducats. Je ne crois pas plus que Voltaire à l’histoire ridicule de cet esclave qu’on décapita pour faire voir au peintre le jeu des muscles.

[3172] Ces empereurs ivrognes furent Soliman Ier, Selim II et Amurath IV (Cantemir, p. 61). Les sophis de la Perse offrent dans ce genre une liste plus longue et plus complète ; et dans le dernier siècle nos voyageurs européens assistèrent à leurs orgies et les partagèrent.

[3173] On sauva Calapin, un de ces jeunes princes, des mains de son barbare frère, et il reçut à Rome le baptême et le nom de Callistus Othomanus. L’empereur Frédéric III lui accorda un domaine en Autriche, où il termina sa carrière ; et Cuspinien, qui dans sa jeunesse avait conversé à Vienne avec ce prince, alors avancé en âge, donne des éloges à sa piété et à sa sagesse (de Cæsaribus, p. 672, 673).

[3174] Voyez l’avènement de Mahomet II au trône, dans Ducas (c. 33), Phranza (l. I, c. 33 ; l. III, c. 2), Chalcocondyles (l. VII, p. 199), et Cantemir (p. 96).

[3175] Avant de décrire le siège de Constantinople, j’observerai qu’à l’exception d’un petit nombre de mots jetés en passant par Cantemir et Leunclavius, je n’ai pu me procurer sur cet événement aucune relation faite par les Turcs, ni rien de pareil au récit du siège de Rhodes par Soliman II (Mém. de l’Acad. des Inscript., t. XXVI, p. 723-769). Je dois donc m’en rapporter aux Grecs, dont les préjugés se trouvent à quelques, égards diminués par leur détresse. Je suivrai principalement Ducas (c. 34-42), Phranza (l. III, c. 7-20), Chalcocondyles (l. VIII, p. 201-214) et Léonard de Chios (Historia C. P. à Turco expugnatæ, Nuremberg, 1544, in-4°, vingt feuilles). Le dernier de ces récits est le plus ancien, puisqu’il fut composé dans l’île de Chios, le 16 août 1453, soixante-dix-neuf jours après la prise de Constantinople, et dans la première confusion d’idées et de sentiments excitée par un semblable événement. 0n peut tirer quelques aperçus d’une lettre du cardinal Isidore (in Farra gine rerum turcicarum, ad talc. Chalcocondyles, Clauseri, Bâle, 1556) au pape Nicolas V, et d’un Traité de Théodose Zygomala, qu’il adressa l’an 1581 à Martin Crusius (Turco-Græcia, l. I, p. 74-98, Bâle, 1584). Spondanus (A. D. 1453, n° 1-27) fait en peu de mots, mais en bon critique, la révision des faits et des matériaux divers. Je prendrai la liberté de négliger les relations de Monstrelet et des Latins, éloignés du lieu de la scène, qui toutes se fondent sur des ouï-dire.

[3176] Peter Gyllius (de Bosphoro Thracio, l. II, c.13), Leunclavius (Pandect., p. 445) et Tournefort (Voyage dans le Levant, t. II, lettre XV, p. 443, 444) sont les auteurs qui font le mieux connaître la situation de la forteresse et la topographie du Bosphore ; mais je regrette la carte ou le plan que Tournefort envoya en France au ministre de la marine. Le lecteur peut relire le chapitre XVII de cette Histoire.

[3177] Ducas exprime par le terme de kabour le nom de mépris que les Turcs donnent aux infidèles, et Leunclavius et les modernes, par celui de giaour. Le premier mot vient, selon Ducange (Gloss. grœc., t. I, p. 530), de καβουρον, qui en grec vulgaire signifie tortue, et par lequel les Turcs voudraient désigner un mouvement rétrograde hors de la foi. Mais, hélas ! gabour (Bibl. orient., p. 375) n’est autre chose que le mot gheber, qui a passé de la langue persane dans la langue turque, et a été transporté des adorateurs du feu à ceux de la croix.

[3178] Phranza rend témoignage du bon sens et du courage de son maître : Calliditatem hominis non ignorans imperator prior, arma movere constituit ; et il traite avec un mépris hérité l’absurdité des cum sacri tum profani proceres qu’il avait entendus amentes spe vana pasci. Ducas n’était pas du conseil privé.

[3179] Au lieu de ce récit clair et suivi, les Annales turques (Cantemir, p. 97) font revivre le conte ridicule de la peau de bœuf et du stratagème qu’employa Didon pour la construction de Carthage. Ces annales, si ce n’est pour ceux qu’égarent des préventions antichrétiennes, sont fort au-dessous des histoires grecques.

[3180] Sur les dimensions de cette forteresse, qu’on nomme aujourd’hui le vieux château d’Europe, Phranza n’est pas tout à fait d’accord avec Chalcocondyles, dont la description a été vérifiée sur les lieux par son éditeur Leunclavius.

[3181] Parmi les Turcs qui se trouvèrent à Constantinople lorsqu’on ferma les portes, il y avait quelques pages de Mahomet, si convaincus de son inflexible rigueur, qu’ils demandèrent qu’on leur coupât la tête si on leur ôtait les moyens d’être de retour au camp avant le coucher du soleil.

[3182] Ducas, c. 35. Phranza (l. III, c. 3), qui avait navigué sur le vaisseau de ce capitaine vénitien, le regarde comme un martyr.

[3183] Auctum est Palæologorum genus, et imperii successor, parvœque Romanorum scintillæ hæres natus, Andrœas, etc. (Phranza, l. III, c. 7.) Cette expression énergique a été inspirée par sa douleur.

[3184] Cantemir, p. 97, 98. Le sultan doutait de sa conquête, ou ignorait les avantages de Constantinople. Une ville et un royaume peuvent quelquefois être ruinés par la destinée de leur souverain.

[3185] Le président Cousin, traduit le mot συντροφος par celui de père nourricier : il suit, il est vrai, la version latine ; mais dans sa précipitation il a négligé la note dans laquelle Ismaël Boillaud (ad Ducam, c. 35) reconnaît et rectifie sa propre erreur.

[3186] L’usage de ne jamais paraître qu’avec des présents devant son souverain ou devant son supérieur, est très ancien parmi les Orientaux, et parait analogue à l’idée de sacrifice, idée encore plus ancienne et plus universelle. Voyez des exemples de cette coutume en Perse, dans Ælien (Hist. Variar., le I, c. 31, 32, 33).

[3187] Le lala des Turcs (Cantemir, p. 34) et le tata des Grecs (Ducas, c. 35) viennent des premières syllabes que prononcent les enfants ; et on peut observer que ces mots primitifs, qui désignent leurs parents, ne sont qu’une répétition d’une même syllabe, composée d’une consonne labiale ou dentale, et d’une voyelle ouverte. De Brosses, Mécanisme des langues, t. I, p. 231- 247.

[3188] Le talent attique pesait environ soixante mines ou livres avoir-du-poids (voyez Hooper on Ancient Weights Measures, etc.) ; mais parmi les Grecs modernes on a donné cette dénomination classique à un poids de cent et de cent vingt-cinq livres (Ducange, ταλαντον). Léonard de Chios mesure le boulet ou la pierre du second canon : Lapidem qui palmis undecim ex meis abidibat in gyro.

[3189] Voyez Voltaire, Hist. génér., c. 91, p. 294, 295. Il aspirait en littérature à la monarchie universelle ; on le voit dans ses poésies prétendre au titre d’astronome, de chimiste, etc., et chercher à en emprunter le langage.

[3190] Le baron de Tott (t. III, p. 85-99), qui fortifia les Dardanelles contre les Russes dans la dernière guerre, a décrit d’un ton animé et même comique sa prouesse et la consternation des Turcs. Mais cet aventureux voyageur ne possède pas l’art d’inspirer la confiance.

[3191] Non audivit, indignum ducens, dit l’honnête Antonin ; mais comme l’inquiétude et la honte se firent bientôt sentir à la cour de Rome, Platina dit du ton d’un courtisan plus habile : In animo fuisse pontifici juvare Grœcos. Æneas Sylvius dit encore plus positivement : Siractam classem, etc., (Spond., A. D. 1453, n° 1).

[3192] Antonin, in Proëm. epist. cardinal. Isid., ap. Spond. Le docteur Johnson a très bien exprimé dans sa tragédie d’Irène cette circonstance caractéristique :

The groaning Greeks dig up the golden caverns,

The accumulated wealth of hoarding ages ;

That wealth which, granted to their weeping prince,

Had rang’d embattled nations at their gates.

Les Grecs tirèrent, en gémissant, du sein de la terre ces monceaux d’or, trésors accumulés des générations avares ; trésors qui, accordés aux larmes de leur prince, eussent rangé devant leurs portes des nations entières de soldats.

[3193] Les troupes chargées de la garde du palais sont appelées capiculi chez les Turcs ; et celles des provinces ceratculi. La plupart des noms et des institutions de la milice turque existaient avant le canon Nameli de Soliman II, d’après lequel le comte Marsigli, aidé de sa propre expérience, a composé son État militaire de l’empire ottoman.

[3194] L’observation de Philelphe est approuvée en 1508 par Cuspinien (de Cæsaribus, in epilog. de militia turcica, p. 697). Marsigli, prouve que les armées effectives des Turcs sont beaucoup moins nombreuses qu’elles ne le paraissent. Léonard de Chios ne compte que quinze mille janissaires dans l’armée qui assiégea Constantinople.

[3195] Ego, eidem (imp.) tabellas exhibui non absque dolore et mœstitia, mansitque apud nos duos aliis occultus numerus. (Phranza, l. III, c. 8.) En lui passant quelques préventions nationales, on ne peut désirer un témoin plus authentique, non seulement des faits publics, mais des conseils privés.

[3196] Spondanus raconte l’union non seulement, avec partialité, mais d’une manière imparfaite. L’évêque de Pamiers mourut en 1642, et l’histoire de Ducas, qui parle de ces faits (c. 36, 37) avec tant de vérité et de courage, n’a été imprimée qu’en 1649.

[3197] Phranza, qui était au nombre des Grecs conformistes, avoue qu’on ne se prêta à cette réconciliation que propter spem auxilii ; et en parlant de ceux qui ne voulurent pas assister au service commun dans l’église de Sainte-Sophie, il affirmé avec plaisir que extra culpam et in pace essent (l. II, c. 20).

[3198] Son nom séculier était Scholarius, auquel il substitua celui de Gennadius quand il se fit moine ou lorsqu’il devint patriarche. Comme il défendit à Florence cette union qu’il avait attaque à Constantinople avec fureur, Léon Allatius (Diatrib. de Georgiis in Fabric. Bibl. græc., t. X, p. 760-786) s’est persuadé qu’il avait existé deux hommes de ce nom ; mais Renaudot (p. 343-383) a rétabli l’identité de sa personne et la duplicité de son caractère.

[3199] Φακιολιον, καλυπτα, sont assez, bien rendus par chapeau de cardinal. La différence de vêtement des Grecs et des Latins aigrit encore la mésintelligence.

[3200] Il faut réduire les milles grecs à une très petite mesure, qui s’est conservée dans les verstes de Russie, lesquelles sont de cinq cent quarante-sept toises de France, et de cent quatre deux cinquièmes au degré : les six milles de Phranza n’excèdent pas quatre milles d’Angleterre, selon d’Anville (Mesures itinéraires, p.  61-123, etc.).

[3201] At indies doctiores nostri facti paravere contra postes machinamenta, quæ tamen avare dabantur. Pulvis erat nitri modica exigua ; tela modica ; bombardœ, si aderant, incommoditate loci primum hostes offendere maceriebus alveisque tectos non poterant. Nam si equæ magnœ erant, ne murus concuteretur noster, quiescebant. Ce passage de Leonardus de Chios est curieux et important.

[3202] Selon Chalcocondyles et Phranza, le grand canon creva. Selon Ducas, l’habileté du canonnier empêcha cet accident. Il est clair qu’ils ne parlent pas de la même pièce.

[3203] Environ un siècle après le siège de Constantinople, les escadres de France et d’Angleterre se vantèrent d’avoir tiré trois cents coups dans un combat de deux heures qui eut lieu dans la  Manche (Mém. de Martin du Bellay, l. X, dans la Collection générale, t. XXI, p. 239).

[3204] J’ai choisi quelques faits curieux, sans prétendre à l’éloquence meurtrière et infatigable de l’abbé Vertot, dans ses prolixes récits des sièges de Rhodes, de Malte, etc. Cet agréable historien avait l’esprit romanesque, et, écrivant pour plaire aux chevaliers de Malte, il a pris leur enthousiasme et leur esprit de chevalerie.

[3205] La théorie des mines d’artifice se trouve pour la première fois en 1480 dans un manuscrit de Georges de Sienne (Tiraboschi, t. VI, part. I, p. 324). On les employa d’abord à Sarzanella en 1487 mais leur amélioration est de 1503, et on en attribue l’honneur à Pierre de Navarre, qui les employa avec succès dans les guerres d’Italie (Hist. de la Ligue de Cambrai, t. II, p. 93-97).

[3206] Il est singulier que les Grecs ne s’accordent pas sur le nombre de ces célèbres vaisseaux. Ducas en indique cinq, Phranza et Léonard en indiquent quatre, et Chalcocondyles en indique deux ; il faut que les uns se bornent à indiquer les plus grands, tandis que les autres indiquent en outre les plus petits. Voltaire, qui donne un de ces navires à Frédéric III, confond les empereurs d’Orient et d’Occident.

[3207] Le président Cousin dédaigne ouvertement ou plutôt ignore complètement toutes les notions de la langue et de la géographie, lorsqu’il retient ces vaisseaux à Chios par un vent du sud, et qu’il les conduit à Constantinople par un vent du nord.

[3208] On peut observer la faiblesse et la décadence continuelle de la marine turque dans Rycault (State of the ottoman Empire, p. 312-375), dans Thévenot (Voyages, parts I, p. 229-242) et dans les Mémoires du baron de Tott (t. III). Ce dernier écrivain cherche toujours à amuser et à étonner son lecteur.

[3209] Je dois l’avouer, j’ai sous les yeux le tableau animé que fait Thucydide (l. VII, c. 71) de l’effervescence et des gestes des Athéniens durant un combat naval qui eut lieu dans le grand port de Syracuse.

[3210] Selon le texte exagéré ou corrompu de Ducas (c. 38), cette barre d’or pesait cinq cents livres. Bouillaud lit cinq cents drachmes ou cinq livres, et ce poids suffisait pour exercer le bras de Mahomet et froisser le corps de son amiral.

[3211] Ducas, qui s’avoue mal informé sur les affaires de Hongrie, donne à ce fait un motif de superstition. Les Hongrois, dit il, croyaient que Constantinople serait le terme de la conquête des Turcs. Voyez Phranza (l. III, c. 20) et Spondanus.

[3212] Le témoignage unanime des quatre Grecs est confirmé par Cantemir (p. 96), d’après les Annales turques ; mais je voudrais réduire la distance de dix milles, et prolonger l’intervalle d’une nuit.

[3213] Phranza cite deux exemples de navires qu’on transporta ainsi sur l’isthme de Corinthe l’espace de six milles : l’un fabuleux, celui d’Auguste après la bataille d’Actium ; l’autre véritable, celui de Nicétas, général grec du dixième siècle. Il aurait pu y ajouter l’audacieuse entreprise d’Annibal pour introduire ses navires dans le port de Tarente (Polybe, l. VIII, p. 749, édit. de Gronov.).

[3214] Cette opération fut peut-être conseillée et exécutée par un Grec de Candie, qui avait servi les Vénitiens dans une entreprise pareille (Spond., A. D. 1438, n° 37).

[3215] Je veux surtout parler de nos embarquements sur les lacs du Canada en 1776 et 1777, dont le travail fut si considérable, et dont l’effet fut si inutile.

[3216] Chalcocondyles et Ducas diffèrent sur l’époque et les détails de la négociation ; et comme elle ne fut ni glorieuse ni salutaire, le fidèle Phranza épargne à son prince jusqu’à la pensée de se rendre.

[3217] Ces ailes (Chalcocondyles, l. VIII, p. 208) ne sont qu’une figure orientale ; mais dans la tragédie anglaise d’Irène, la passion de Mahomet sort des bornes de la raison et même du sens commun.

Should the fierce North, upon his frozen wings,

Bear him aloft above the wondering clouds,

And seat him in the Pleiads’ golden, chariot —

Thence should my fury drag him down to tortures.

Quand le fougueux vent du nord, sur ses ailes glacées, l’emporterait au-dessus des nuages étonnés, et le déposerait dans le char doré des Pléiades, ma fureur l’en arracherait pour le livrer aux tourments !

Indépendamment de l’extravagance de ce galimatias, j’observerai, 1° que l’action des vents ne s’exerce pas au-delà de la région inférieure de l’atmosphère ; 2° que le nom, l’étymologie et la fable des Pléiades, sont purement grecs (Scholiast. ad Honer., Σ. 686, Eudocia in Ionia, p. 339 ; Apollodore, l. III, c. 10 ; Heyne, p. 229, not. 682), et n’avaient point d’analogie avec l’astronomie de l’Orient (Hyde, Ulugbeg. Tabul. in Syntag. Disserta, t. I, p. 46-42 ; Goguet, Origine des arts, etc., t. VI, p. 73-78 ; Gebelin, Hist. du Calendrier, p. 73) que Mahomet avait étudiée ; 3° le char doré n’existe ni dans la science de l’astronomie ni dans la fable. J’ai peur que le docteur Johnson n’ait confondu les Pléiades avec la grande ourse ou le chariot, le zodiaque avec une constellation du nord :

Αρκτον θ'ην και αμαξαν επικλησιν καλεουσι.

[3218] Phranza s’indigne contre ces acclamations des musulmans, non pour l’emploi du nom de Dieu, mais parce qu’ils y mêlent celui du prophète. Le zèle pieux de Voltaire est excessif et même ridicule.

[3219] Je crains que Phranza n’ait composé ce discours, et il a une odeur si forte de sermon et de couvent, que je doute beaucoup que Constantin l’ait prononcé. Léonard lui attribue une autre harangue, dans laquelle il montre plus d’égards pour les Latins qui lui servaient d’auxiliaires.

[3220] Cette marque d’humilité que la dévotion a quelquefois arrachée aux princes qui se trouvaient au lit de la mort, est un perfectionnement ajouté à la doctrine de l’Évangile sur le pardon des injures : il est plus facile de pardonner quatre cent quatre-vingt-dix fois, que de demander une seule fois pardon à un inférieur.

[3221] Outre les dix mille gardes, les matelots et les soldats de marine, Ducas compte deux cent cinquante mille Turcs, cavaliers ou fantassins, comme ayant eu part à l’assaut général.

[3222] Phranza, dans la sévère censure qu’il fait de l’évasion de Justiniani, exprime sa douleur et celle du public. Ducas, d’après des raisons que nous ne connaissons point, le traite avec plus de douceur et d’égards ; mais les expressions de Léonard de Chios manifestent une indignation encore dans toute sa force, gloria salutis suique oblitus. Les Génois, compatriotes de Justiniani, ont toujours été suspects et souvent coupables dans tout ce qu’ils ont fait en Orient.

[3223] Ducas dit que l’empereur fut tué par deux soldats turcs. Si l’on en croit Chalcocondyles, il fut blessé à l’épaule et ensuite écrasé sous la porte de la ville. Phranza, entraîné par son désespoir, se précipita au milieu des Turcs, et ne fut pas témoin de la mort de Paléologue, mais nous pouvons sans flatterie lui appliquer ces nobles vers de Dryden :

Quant à Sébastien, laissons-les le chercher par toute la plaine, et lorsqu’on trouvera une montagne de morts, qu’un d’eux la gravisse ; alors regardant au-dessous de lui, il le reconnaîtra à sa mâle stature, et le verra le visage tourné vers le ciel et enseveli dans ce sanglant monument qu’a formé autour de lui sa forte épée.

[3224] Spondanus (A. D. 1453, n° 10), qui espère le salut de l’empereur, désire pouvoir absoudre cette demande du crime de suicide.

[3225] Léonard de Chios observe avec raison que si les Turcs avaient reconnu l’empereur, ils auraient fait des efforts pour sauver un captif, dont la prise eût été si agréable à Mahomet.

[3226] Cantemir, p. 96. Les vaisseaux chrétiens qui étaient à l’embouchure du havre, avaient soutenu et retardé l’attaque de ce côté.

[3227] Chalcocondyles suppose ridiculement que les Asiatiques saccagèrent Constantinople pour venger les anciens malheurs de Troie ; et les grammairiens du quinzième siècle se plaisent à faire dériver la grossière dénomination de Turcs du nom plus classique de Teucri.

[3228] Lorsque Cyrus surprit Babylone, qui célébrait une fête, la ville était si grande et les habitants faisaient la garde avec si peu de soin, qu’il fallut un longtemps pour instruire les quartiers éloignés du succès du roi de Perse. Hérodote (l. I, c. 191) ; et Usher (Annal., p. 78), qui cite sur ce point un passage du prophète Jérémie.

[3229] Cette description animée est tirée de Ducas (c. 39), qui, deux années après, se rendit auprès du sultan en qualité d’ambassadeur du prince de Lesbos (c. 44). Jusqu’à la conquête de Lesbos en 1463 (Phranza, l. III, c. 27), cette île dut être remplie de réfugiés de Constantinople, qui se plaisaient à redire et peut-être à embellir l’histoire de leurs malheurs.

[3230] Voyez Phranza, l. III, c. 201.21. Ses expressions sont positives : Ameras sua mana jugulavit..... volebat enim eo turpiter et nefarie abuti. Me miserum et infelicem ! Au reste, il ne put savoir que par ouï-dire les scènes sanglantes ou infâmes qui se passaient au fond du sérail.

[3231] Voyez Tiraboschi (t. VI, part. I, p. 290) et Lancelot (Mém. de l’Acad. des Inscript., t. X, p. 718). Je serais curieux de savoir comment il a pu louer cet ennemi public, qu’il outrage en plusieurs endroits comme le plus corrompu et le plus inhumain des tyrans.

[3232] Les Commentaires de Pie II supposent qu’Isidore plaça son chapeau de cardinal sur la tête d’un mort, que cette tête fut coupée et portée en triomphe, tandis que le légat lui-même fut vendu et délivré comme un captif sans valeur. La grande Chronique des Belges ajoute de nouvelles aventures à l’évasion d’Isidore. Celui-ci, dit Spondanus (A. D. 1453, n° 15), les supprima dans ses lettres, de crainte de perdre le mérite et la  récompense d’avoir souffert pour Jésus-Christ.

[3233] Busbecq s’étend avec plaisir et approbation sur les droits de la guerre et sur la servitude si commune parmi les anciens et parmi les Turcs (de Legat. Turcica, epist. 3, p. 161).

[3234] Cette somme est indiquée dans une note marginale de Leunclavius (Chalcocondyles, l. VIII, p. 211) ; mais lorsqu’on nous dit que Venise, Gênes, Florence et Ancône, perdirent cinquante, vingt et quinze mille ducats, je soupçonne qu’il y a un chiffre d’oublié ; et, dans cette supposition même, les sommes enlevées aux étrangers passeraient à peine le quart de la somme totale du butin.

[3235] Voyez les éloges exaltés et les lamentations de Phranza (l. III, c. 17).

[3236] Voyez Ducas (c. 43) et une lettre du 15 juillet 1453, écrite par Laurus Quirinus au pape Nicolas V (Hody, de Grœcis, p. 192 d’après un manuscrit de la Bibliothèque de Cotton).

[3237] On suivait à Constantinople le calendrier julien, qui compte les jours et les heures depuis minuit ; mais Ducas semble ici prendre les heures à compter du lever du soleil.

[3238] Voyez les Annales turques, p. 329, et les Pandectes de Leunclavius, p. 448.

[3239] J’ai déjà parlé de ce monument curieux de l’antiquité grecque. Voyez le chapitre XVII de cet ouvrage.

[3240] Nous devons à Cantemir (p. 182), les détails donnés par les Turcs sur la conversion de Sainte-Sophie en mosquée, que Phranza et Ducas déplorent avec tant d’amertume. Il est assez amusant d’observer comment le même objet paraît sous des jours opposés à un musulman et à un chrétien.

[3241] Ce distique, rapporté par Cantemir en original, tire une nouvelle beauté de l’application. C’est ainsi qu’au sac de Carthage, Scipion répéta la fameuse prophétie d’Homère. C’est même un sentiment généreux qui a reporté l’esprit des deux conquérants sur le passé ou sur l’avenir.

[3242] Je ne puis croire avec Ducas (voyez Spondanus, A. D. 1453, n° 13) que Mahomet ait fait porter la tête de l’empereur grec à travers les provinces de la Perse, de l’Arabie, etc. Il se serait sûrement contenté de trophées moins inhumains.

[3243] Phranza était l’ennemi personnel du grand-duc, et ni le temps, ni la mort de cet ennemi, ni la retraite de Phranza dans un monastère, n’ont pu lui arracher un mouvement d’intérêt ou de pardon. Ducas penche à louer le grand-duc comme martyr ; Chalcocondyles est neutre ; mais c’est lui qui nous fait entendre que les Grecs avaient formé une conspiration.

[3244] Voyez sur le rétablissement de Constantinople et les fondations des Turcs, Cantemir (p. 102-109), Ducas (c. 42), Thévenot, Tournefort, et nos autres voyageurs modernes. L’auteur de l’Abrégé de l’Histoire ottomane (t. I, p. 16-21) fait un tableau exagéré de la grandeur et de la population de Constantinople, d’où nous pouvons apprendre toutefois, qu’en 1586 les musulmans étaient moins nombreux dans cette capitale que les chrétiens ou même les Juifs.

[3245] Le Turbé ou monument sépulcral d’Abou-Ayub, est décrit et gravé dans le Tableau général de l’empire ottoman (Paris, 1787, grand in-folio), ouvrage qui est peut-être plus magnifique qu’utile (t. I, p. 305, 306).

[3246] Phranza (l. III, c. 19) décrit cette cérémonie, qui s’est peut-être embellie en passant dans la bouche des Grecs et dans celle des Latins. Le fait est confirmé par Emmanuel Malaxus, qui a écrit en grec vulgaire, l’Histoire des Patriarches après la prise de Constantinople, insérée dans la Turco-Græcia de Crusius (l. V, p. 106-184). Mais les lecteurs les plus dociles auront peine à croire que Mahomet ait adopté cette formule catholique : Sancta Trinitas quœ mihi donavit imperium te in patriarcham novœ Romæ delegit.

[3247] Spondanus décrit (A. D. 1453, n° 21 ; 1458, n° 16), d’après la Turco-Grœcia de Crusius, l’esclavage et les querelles intestines de l’Église grecque. Le patriarche qui succéda à Gennadius, se jeta de désespoir dans un puits.

[3248] Cantemir (p. 101-105) insiste sur le témoignage unanime des historiens turcs anciens et modernes ; il dit que ces auteurs ne se seraient pas permis un mensonge pour diminuer leur gloire nationale, puisqu’il est plus honorable de prendre une ville d’assaut que par capitulation : mais, 1° ces témoignages me paraissent douteux, puisqu’il ne cite aucun historien particulier, et que les Annales turques de Leunclavius affirment, sans exception, que Mahomet prit Constantinople per vim (p. 329). 2° On peut employer le même argument en faveur des Grecs contemporains, qui n’auraient pas oublié ce traité honorable et salutaire. Voltaire préfère, selon son usage, les Turcs aux chrétiens.

[3249] Voyez Ducange (Fam. byzant., p. 195) sur la généalogie et la chute des Comnènes de Trébisonde ; sur les derniers Paléologues, ce même antiquaire, toujours exact dans ses recherches (p. 244-247, 248). La branche des Paléologues de Montferrat ne s’éteignit que dans le siècle suivant ; mais ils avaient oublié leur origine et les parents qui leur restaient en Grèce.

[3250] Dans l’indigne histoire des disputes et des malheurs des deux frères, Phranza (l. III, c. 21-30) montre trop de préventions en faveur de Thomas Ducas (c. 44, 45) est trop bref ; Chalcocondyles (l. VIII, IX, X) est trop diffus et se permet trop de digressions.

[3251] Voyez la perte ou la conquête de Trébisonde dans ses conquêtes dans Chalcocondyles (l. IX, p. 263-266), Lucas (c. 45), Phranza (l. III, c. 27) et Cantemir (p. 107).

[3252] Tournefort (t. III, lettre 17, p. 179) dit que Trébisonde est mal peuplée ; mais Peyssonel, le dernier et le plus exact des observateurs, lui donne cent mille habitants (Commerce de la mer Noire, t. II, p. 72, et pour la province, p. 53-90). Sa prospérité et son commerce sont troublés continuellement par les querelles factieuses des deux Odas de janissaires, dans l’une desquelles s’enrôlent ordinairement trente mille Lazis (Mém. de Tott, t. III, p. 16, 17).

[3253] Ismaël Beg, prince de Sinope ou de Sinople, avait un revenu de deux cent mille ducats, qui provenait surtout de ses mines de cuivre (Chalcocondyles, l. IX, p. 258, 259). Peyssonel (Commerce de la mer Noire, t. II, p. 100) donne à la ville moderne soixante mille habitants. Cette population parait énorme ; toutefois c’est en commerçant avec un peuple qu’on connaît sa richesse et sa population.

[3254] Spondanus raconte, d’après Gobelin (Comment. Pii II, l. V), l’arrivée et la réception du despote Thomas à Rome (A. D. 1461, n° 3).

[3255] Par un acte daté A. D. 1494, septembre 6, et transporté dernièrement des archives du Capitole à la Bibliothèque du roi à Paris, le despote André Paléologue, en se réservant la Morée et quelques avantages particuliers, transmit à Charles VIII, roi de France, les empires de Constantinople et de Trébisonde (Spondanus, A. D. 1495, n° 2). M. de Foncemagne (Mém. de l’Acad., des Inscript., t. XVII, p. 539-578) a donné une dissertation sur cet acte dont il avait reçu une copie de Rome.

[3256] Voyez Philippe de Comines (l. VII, c. 14), qui compte avec plaisir le nombre de Grecs dont on espérait le soulèvement. Il ajouté dans ses calculs que les Français n’auraient à faire que soixante milles d’une navigation aisée, la distance de Valona à Constantinople étant seulement de dix-huit jours de marche, etc. L’empiré turc fut sauvé en cette occasion par la politique de Venise.

[3257] Voyez les détails de cette fête dans Olivier de La Marche (Mémoires, part. I, c. 29, 30) et l’extrait et les observations de M. de Sainte-Palaye (Mém. sur la Chevalerie, t. I, part. III, p. 182-185). Le paon était, ainsi que le faisan, considéré comme un oiseau royal.

[3258] D’après un dénombrement qui se fit alors, on trouva que la Suède, la Gothie et la Finlande, contenaient dix-huit cent mille combattants, et qu’ainsi elles étaient bien plus peuplées que de nos jours.

[3259] Spondanus a fait, en 1454, d’après Æneas Sylvius, le tableau de l’état de l’Europe, qu’il a enrichi de ses observations. Ce précieux annaliste et l’Italien Muratori donnent la suite des événements depuis 1453 jusqu’en 1481, époque de la mort de Mahomet, et à laquelle je terminerai ce chapitre.

[3260] Outre les deux annalistes indiqués dans la note précédente, le lecteur peut consulter Giannone (Istoria civile, l. III, p., 449-455) sur l’invasion du royaume de Naples par les Turcs. Quant aux détails du règne et des conquêtes de Mahomet II, j’ai fait usage quelquefois des Memorie istoriche de Monarchi ottomani di Giovanni Sagredo, Venise, 1677, in-4°. Soit en temps de paix ou en temps de guerre, les Turcs ont toujours fixé l’attention de la république de Venise. Sagredo, en qualité de procurateur de Saint-Marc, examina toutes les dépêches et toutes les archives de cette république, et il n’est pas sans mérite ni pour le fond ni pour le style. Cependant il a trop d’aigreur contre les infidèles ; il ignore leur langue et leurs mœurs, et sa narration, qui n’offre que soixante-dix pages sur Mahomet II (p. 69-140), devient plus détaillée et plus authentique à mesure qu’il approche des années 1640 et 1644, terme de ses travaux historiques.

[3261] Comme c’est ici la fin de mes travaux sur l’empire grec, je vais dire quelques mots sur la grande collection des écrivains de Byzance, dont j’ai souvent employé les noms, et les témoignages dans le cours de cette histoire. Alde et les Italiens n’imprimèrent en grec que les auteurs classiques des temps plus éclairés ; et c’est aux Allemands que nous devons les premières éditions de Procope, d’Agathias, de Cedrenus, de Zonare, etc. Les volumes de la Byzantine (36 vol. in-folio) sont sortis successivement (A. D. 1648, etc.) de l’imprimerie du Louvre, avec quelques secours des imprimeries de Rome et de Leipzig. Mais l’édition de Venise (A. D. 1729), moins chère à la vérité et plus abondante, est aussi inférieure à celle de Paris en correction qu’en magnificence. Les Français qui furent chargés de l’édition n’ont pas tous le même mérite ; mais les notes historiques de Charles Dufresne Ducange donnent du prix au texte d’Anne Comnène de Cinnamus, de Villehardouin, etc. Les autres ouvrages qu’il a publiés sur ces matières, c’est-à-dire le Glossaire grec, la Constantinopolis christiana et les Familiœ byzantin, répandent une vive lumière sur les ténèbres du bas-empire.

[3262] L’abbé Dubos, qui a soutenu et exagéré l’influence du climat avec moins de génie que Montesquieu son successeur, s’objecte lui-même la dégénération des Romains et des Bataves. Il répond sur le premier de ces exemples, 1° que l’altération est moins réelle qu’apparente, et que les modernes Romains ont la prudence de cacher en eux-mêmes les vertus de leurs ancêtres ; 2° que l’air, le sol et le climat de Rome, ont souffert une grande et visible altération. Réflexions sur la Poésie et la Peinture, part. II, sect. 16.

[3263] Le lecteur est éloigné de Rome, depuis si longtemps, que je lui conseille de se rappeler, ou de relire le quarante-neuvième chapitre de cette histoire.

[3264] Les auteurs qui décrivent le mieux le couronnement des empereurs d’Allemagne, surtout de ceux du onzième siècle, sont Muratori, qui suit les monuments originaux. (Antiq. Ital. medii œvi, t. I, Dissert. 1, p. 99, etc.), et Cenni (Monument. domin. pontif., t. II, Dissert. 6, p. 261). Je ne connais le dernier que par les extraits étendus de Schmidt (Hist. des Allemands, t. III, p. 255-266).

[3265] Exercitui romano et teutonico ! On s’apercevait en effet de la réalité de l’armée des Allemands ; mais ce qu’on appelait l’armée romaine n’était plus que magni nominis umbra.

[3266] Muratori a donné la série des monnaies pontificales (Antiquit., t. II, Dissert. 2, p. 548-554). Il n’en trouve que deux antérieures à l’année 800 ; nous en avons cinquante depuis Léon III jusqu’à Léon IX, où l’on voit le titre et l’image de l’empereur qui régnait alors : aucune de celles de Grégoire VII ou d’Urbain II n’est parvenue jusqu’à nous ; mais il paraît que Pascal II ne voulut pas permettre sur les siennes cette preuve de dépendance.

[3267] Voyez Ducange, Gloss. mediœ et infimœ latinitatis, t. VI, p. 364, 365, Staffa. Les rois rendaient cet hommage aux archevêques, et les vassaux le rendaient à leurs seigneurs (Schmidt, t. III, p. 262) ; c’était un des plus adroits moyens de politique de la cour de Rome que de confondre les marques de la soumission filiale et celles de la soumission féodale.

[3268] Le zélé saint Bernard (de Consideratione, l. III, t. II, p. 431-442, éd. de Mabillon, Venise, 1750) et le judicieux Fleury (Discours sur l’hist. ecclés., IV et VII) déplorent ces appels que toutes les Églises formaient devant le pontife romain ; mais le saint, qui croyait aux fausses décrétales, ne condamne que l’abus de ces appels ; l’historiens plus éclairé recherche l’origine et combat les principes de cette nouvelle jurisprudence.

[3269] Germanici..... summarii non levatis sarcinis onusti nihilominus repatriant inviti. Nova res ! Quando hactenus aurum Roma refudit ? et nunc Romanorum concilio id usurpatum non credimus. (Saint-Bernard, de Consideratione, l. III, c. 3, p. 437.) Les premiers mots de ce passage sont obscurs et vraisemblablement altérés.

[3270] Quand les sauvages de la Louisiane veulent avoir du fruit, ils coupent l’arbre au pied et cueillent le fruit. Voilà le gouvernement despotique (Esprit des Lois, l. V, c. 13), et les passions et l’ignorance sont toujours despotiques.

[3271] Jean de Salisbury, dans une conversation familière avec Adrien IV, son compatriote, accuse l’avarice du pape et du clergé : Provinciarurn deripiunt spolia, ac si thesauros Crœsi studeant reparare. Sed recte cum eis agit Altissimus, quoniam et ipsi aliis et sœpe vilissimis hominibus dati sunt in direptionem (de Nugis Curialium, l. VI, c. 24, p. 387). A la page suivante, il blâme la témérité et l’infidélité des Romains, dont les papes s’efforçaient en vain de captiver l’affection avec des présents, au lieu de la mériter par leurs vertus. Il est bien dommage que Jean de Salisbury, qui a écrit sur tant d’objets divers, ne nous ait pas donné, au lieu de moralités et d’érudition, quelque connaissance de lui-même et des mœurs de son temps.

[3272] Humes, History of England, vol. I, p. 419. Le même auteur rapporte, d’après Fitz-Stephen, un acte de cruauté bien atroce et bien singulier que se permit contre les prêtres Geoffroi, père de Henri II. A l’époque où il était mitre de la Normandie, le chapitre de Seez s’avisa de procéder ; sans son consentement, la l’élection d’un évêque ; il ordonna de mutiler tous les chanoines et l’évêque qu’ils avaient nommé, et se fit apporter sur un plat les parties génitales de ces malheureux. Ils pouvaient se plaindre avec raison de la douleur et du danger de cette opération ; mais puisqu’ils avaient fait vœu de chasteté, il ne les privait que d’un trésor inutile.

[3273] On trouve dans les Historiens italiens de Muratori (t. III, part. I, p. 277-685) la vie des papes depuis Léon IX et Grégoire VII, par le cardinal d’Aragon, Pandolphe de Pise, Bernard Guide, etc., écrivains contemporains qui ont écrit, d’après des monuments authentiques ; et j’ai toujours eu ce recueil sous les yeux.

[3274] Les dates qu’on trouvé à la marge de ce chapitre peuvent être envisagées comme des renvois aux Annales de Muratori, cet excellent guide que je suis ordinairement. Il emploie et cite avec la liberté d’un maître da grande Collection des Historiens italiens, en vingt-huit volumes, et ce trésor étant dans ma bibliothèque, c’est par plaisir et non par nécessité que j’ai consulté les originaux.

[3275] Je ne puis m’empêcher de transcrire cet énergique passage de Pandolphe de Pise (p. 3J4) : Hoc acadiens inimicus pacis atque turbator jam factus Centius Frajapane, more draconis immanissimi sibilans, et ab imis pectoribus trahens longa suspiria, accinctus retro gladio sine mora concurrit, valvas ac fores confregit. Ecclesiam furibundus introiit, inde custode remato papam per gulam accepit, distraxit, pugnis calcibusque percussit, et tanquam brutum animal intra limen ecclesiœ acriter calcaribus cruentavit ; et latro tartum dominum per capillos et brachia, Jesu bono interim dormiente detraxit, ad domum usque deduxit, inibi catenavit et inclusit.

[3276] Ego coram Deo et Ecclesiaa dico, si unquam possibile esset, mallem unum impratorem quam tot dominos. (Vit. Gelas. II, p. 398).

[3277] Quid tam notum seculis quam protervia et cervicositas Romanorum ? Gens insueta paci, tumultui assueta, gens immitis et intractabilis usque adhuc, subdi nescia, nisi cum non valet resistere (de Consideratione, l. IV, p. 441). Le saint reprend haleine, puis continue ainsi : Hi invisi terrœ et cœlo, utrique injecere manus, etc. (p. 443).

[3278] Pétrarque, en qualité de citoyen romain, prend la liberté d’observer que saint Bernard, quoique saint, était homme, que le ressentiment put l’entraîner, qu’il a pu se repentir de sa précipitation, etc. Mém. sur la vie de Pétrarque, t. I, p. 330.

[3279] Baronius, dans l’Index du douzième volume de ses Annales, emploie une excuse simple et facile ; il fait deux parts des Romani : il distingue les catholici des schismatici. Il applique aux premiers tout le bien, et aux seconds tout le mal qu’on a dit de la ville de Rome.

[3280] Mosheim expose les hérésies du douzième siècle (Instit. Hist. ecclés., p. 419-427). Il a une opinion favorable d’Arnaud de Brescia. J’ai parlé ailleurs de la secte des pauliciens (c. 54), et j’ai suivi leurs migrations depuis l’Arménie jusque dans la Thrace et la Bulgarie, en Italie et en France.

[3281] Arnaud de Brescia nous a été peint d’original par Othon de Freysingen (Chron., l. VII, c. 31 ; de Gestis Frederici I, l. I, c. 27 ; l. II, c. 21), et dans le troisième livre du Ligurinus, poème de Gunther, auteur qui vivait A. D. 1200, dans le monastère de Paris, prés de Bâle (Fabricius., Bibl. lat. med. et infim. ætat., t. III, p. 174, 175). Guilliman (de Rebus helveticis, l. III, c. 5, p. 108) copie le long passage qui a rapport à cet hérésiarque.

[3282] Bayle, entraîné par son maudit penchant à la plaisanterie, s’est amusé, dans son Dictionnaire critique, à composer avec autant de légèreté que de savoir les articles Abailard, Foulques et Héloïse. Mosheim expose très bien la dispute d’Abailard et du saint Bernard sur plusieurs points de théologie scolastique et positive (Instit. Hist. ecclés., p. 412-415).

[3283] Damnatus ab illo

Prœsule, qui numeros vetitam contingere nostros

Nomen ab INNOCUA ducit, laudabile vita.

Il faut applaudir à l’adresse et à l’exactitude de Ligurinus, qui tire un compliment du nom antipoétique d’Innocent II.

[3284] On a trouvé à Zurich une inscription de Statio Turicensis, en lettres romaines (d’Anville, Notice de l’ancienne Gaule, p. 642-644) ; mais c’est sans preuves que la ville et le canton ont usurpé et même se sont approprié exclusivement les noms de Tigurum et Palus Tigurinus.

[3285] Guilliman (de Rebus helveticis, l. III, c. 5, y. i o6) détaille la donation (A.-D. 833) de l’empereur Louis le Pieux à l’abbesse Hildegarde sa fille. Curtim nostram Turegum in ducatu Alamanniæ in pago Durgaugensi, avec les villages, les bois, les prairies, les eaux, les cerfs, les églises, etc. ; ce qui formait un magnifique présent. Charles le Chauve accorda le jus monetœ ; la ville fut environnée de murs sous Othon Ier ; et les antiquaires de Zurich répètent avec plaisir ce vers de l’évêque de Freysingen :

Nobile Turegum multarum copia rerum.

[3286] Saint-Bernard, epist. 195, 196, t. I, p. 187-190. Au milieu de ses invectives, un aveu important lui est échappé, qui, utinam quam sanæ esset doctrinæ quam districtœ, est vitæ ! Il convient qu’Arnaud serait une acquisition précieuse pour l’Église.

[3287] Il conseillait aux Romains,

Consiliis armisque suis moderamina summa

Arbitrio tractare suo : nil juris in hac re

Pontifici summo, modicum concedere regi

Suadebat populo ! Sic læsa stultus utraque

Majestate, reum geminæ se fecerat aulœ.

Et la poésie de Gunther s’accorde en ce point avec la prose d’Othon.

[3288] Voyez Baronius (A. D. 1148, n° 38, 39), d’après le manuscrit du Vatican : il s’élève à grandi cris contre Arnaud (A. D. 1141, n° 3). C’est à lui qu’il attribue les hérésies politiques qu’on voyait alors en France, et dont l’influence le blessait.

[3289] Le lecteur anglais peut consulter la Biographia britannica, article d’Adrien IV ; mais nos propres auteurs n’ont rien ajouté à la réputation ou au mérite de leur compatriote.

[3290] Outre l’historien et le poète que j’ai déjà cités, le biographe d’Adrien IV raconte les dernières aventures d’Arnaud, (Muratori, Scriptor. rerum italicar., t. III, part. I, p. 441, 442).

[3291] Ducange (Gloss, latin med. et infim. œtat. Decarchones, t. II, p. 726) rapporte ce passage d’après Blondus (Decad. II, l. 2) : Duo consules ex nobilitate quotannis fiebant, qui, ad vetustum consulium exemplar, summæ rerum præessent ; et Sigonius (de Regno Italiœ, l. VI, opp., p. 400) parle des consuls et des tribuns du dixième siècle. Blondus et même Sigonius ont trop suivi la méthode classique de suppléer, par la raison ou l’imagination, à ce qui manquait aux monuments.

[3292] Il est question dans le Panégyrique de Berenger (Muratori, Script. rer. ital., t. II, part. I, p. 408) d’un Romain consulis natus, au commencement du dixième siècle. Muratori (Dissert. 5) a découvert dans les années 952 et 956 un Gratianus in Dei nomine consul et dux, et un Georgius consul et dux ; et en 1015, Romanus, frère de Grégoire VIII, se qualifiait orgueilleusement, mais d’une manière un peu vague, de consul et dux et omnium Romanorum senator.

[3293] Les empereurs grecs ont donné jusqu’au dixième siècle aux ducs de Venise, de Naples, d’Amalfi, etc., le titre de υπατος ou consul (voyez Chron. Sagornini passim), et les successeurs de Charlemagne n’abdiquèrent aucune de leurs prérogatives. Mais en général, les noms de consul et de sénateur, qu’on donnait autrefois chez les Français et les Allemands, ne signifient autre chose que comte ou seigneur (Seigneur, Ducange, Gloss.) Les écrivains monastiques se laissent souvent aller à l’ambition d’employer les belles expressions classiques.

[3294] La forme la plus constitutionnelle est celle qu’on trouve dans un diplôme d’Othon (A. D. 998) qui contient ces mots : Consulibus senatus populique romani ; mais l’acte est vraisemblablement supposé. A l’occasion du couronnement de Henri Ier, A. D., 1014, l’historien Dithmar (ap. Muratori, Dissert. 23) représente : A senatoribus duodecim Vallatum quorum sex rasi barba, alii prolixa, mystice incedebant cum baculis. Le Panégyrique de Berenger fait mention du sénat (p. 406).

[3295] Dans l’ancienne Rome, l’ordre équestre ne devint une troisième branche de la république, composée simplement jusqu’alors du sénat et du peuple, que sous le consulat de Cicéron, qui se donne le mérite de cet établissement (Pline, Hist. nat., XXXIII, 3 ; Beaufort, Républ. rom., t. I, p. 144-155).

[3296] Gunther expose ainsi le plan démocratique qu’avait formé Arnaud de Brescia :

Quin etiam titulos urbis renovare vetustos ;

Nomini plebeio secernere noinen equestre,

Jura tribunorum sanctum reparare senatum,

Et senio fessas mutasque reponere leges.

Lapsa ruinosis et adhuc pendentia muris

Reddere primœvo Capitolia prisca nitori.

Mais quelques-unes de ces réformes étaient des chimères, et d’autres n’étaient que des mots.

[3297] Après de longues disputes parmi les antiquaires de Rome, il paraît aujourd’hui reconnu que le sommet du mont Capitolin, près de la rivière, est le mons Tarpeius, l’Arx, et que sur l’autre sommet, l’église et le couvent d’Araceli, couvent de franciscains déchaussés, occupent la place du temple de Jupiter (Nardini, Roma antica, l. V, c. 11-16).

[3298] Tacite, Hist., III, 69, 70.

[3299] Ce partage des monnaies entre l’empereur et le sénat n’est pas cependant un fait positif, mais l’opinion vraisemblable des meilleurs antiquaires. Voyez la Science des Médailles, du père Joubert, t. II, p. 208-211, dans l’édition perfectionnée et rare du baron de La Bastie.

[3300] La vingt-septième dissertation sur les Antiquités de d’Italie (t. II, p. 559-569 des Œuvres de Muratori) offre une suite de monnaies sénatoriales qui portaient les noms obscurs d’Affortiati, Infortiati, Provisini, Parparini. Durant cette époque, tous les papes, sans en excepter Boniface VII, s’abstinrent du droit de fabriquer des monnaies, que Benoît XI reprit et qu’il exerça d’une manière régulière dans la cour d’Avignon.

[3301] Un historien allemand, Gérard de Reicherspeg (in Baluz. Miscell., t. V, p. 64, apud Schmidt, Hist. des Allem., t. III, p. 265), décrit ainsi la constitution de Rome au onzième siècle : Grandiora urbis et orbis negotia spectant ad romanum ponticem, itemque ad romanum imperatorem ; sive illius vicarium urbis prœfectum, qui de sua dignitate respicit utrumque, videlicet dominum papam cui facit hominium, et dominum imperatorem a quo accipit suœ potestatis insigne, sicilicet gladium exertum.

[3302] Un auteur contemporain (Pandulph. Pisan., in Vit. Pascal. II, p. 357, 358) rapporte de cette manière l’élection et le serment du préfet en 1118 : Inconsultis patribus... loca prœfectoria... laudes præfectorcæ... comitiorum applausum.... juraturum populo in ambonem sublevant... confirmari eum in orbe prœfectum petunt.

[3303] Urbis pæfectum ad ligiam delitatem recepit, et per mantum quod illi donavit de præfectura eum publice investivit, qui usque ad id tempus juramento fadelitatis imperatori fuit obligatus ; et ab eo præfecturæ tenuit honorem (Gesta Innocent. III, in Muratori, t. III, part. I, p. 487).

[3304] Voyez Othon de Freysing., Chron., VII, 31 ; de Gestis Frederici I, l. I, c. 27.

[3305] Un auteur anglais, Roger Hoveden, parle des seuls sénateurs de la famille Capuzzi, etc., quorum, termoribus melius regebatur Roma quam nunc (A. D. 1194) est temporibus LVI senatorum (Ducange, Gloss., t. VII, p. 191, SENATORES).

[3306] Muratori (Dissert. 42, t. III, p. 785-788) a publié un Traité original qui a pour titre : Concordia inter D. nostrum papam Clementem III et senatores populi romani super regalibus et aliis dignitatibus urbis, etc., anno 44° senatus. Le sénat y prend le langage de l’autorité : Reddimus ad prœsens... habebimus... dabitis prœsbyteria... jurabimus pacem et fadelitatem, etc. Le même auteur rapporté aussi une chartula de Tenimentis Tusculani, datée de la quarante-septième année de la même époque, et confirmée decrete amplissimi ordinis senatus acclamatione P. R. publice Capitolio consistentis. C’est là qu’on trouve la distinction de senatores consiliarii et de simples sénateurs (Murat., Diss. 42, t. III, p. 787-789).

[3307] Muratori (Dissert. 45, t. IV, p. 64-92) a très bien expliqué cette forme de gouvernement ; et l’Oculus pastoralis, qu’il a donné à la fin, est un traité ou un sermon sur les devoirs de ces magistrats étrangers.

[3308] Les auteurs latins, ceux du moins du siècle d’argent, transférèrent le titre de potestas de l’office au magistrat :

Hujus qui rahitur prætextam sumere mavis,

An Fidenarun Gabiorumque esse POTESTAS ?

(Juvénal, Satires, X, 99.)

[3309] Voyez la vie et la mort de Brancaléon dans l’Historia major de Matthieu Paris, p. 741, 757, 792, 797, 799, 823, 833, 836, 840. Les pèlerinages et les sollicitations de procès maintenaient des liaisons entre Rome et Saint-Alban ; et le clergé anglais plein de ressentiment, se réjouissait lorsque les papes étaient humiliés et opprimés.

[3310] Matthieu Paris termine ainsi le morceau sur Brancaléon : Caput vero ipsius Brancaleonis in vase pretioso super maratoream columnam collocatum, in signum sici valoris et probitatis, quasi reliquias, superstitiose nimis et pompose sustulerunt. Fuerat enim superborum, potentum et malefactorum urbis, mallens et exstirpator, et populi protector et defensor, veritatis et justitiœ imitator et amator (p. 840). Un biographe d’Innocent IV (Muratori, Script., t. III, part. I, p. 591, 592), fait un portrait moins favorable de ce sénateur gibelin.

[3311] Les historiens dont Muratori a inséré les ouvrages dans le huitième volume de sa Collection, Nicolas de Jamsilla (p. 592), le moine de Padoue (p. 724), Sabas Malespini (l. II, c. 9, p. 808), et Ricordano Malespini (c. 177, p. 999), parlent de la nomination de Charles d’Anjou à l’office de sénateur perpétuel de Rome.

[3312] L’arrogante bulle de Nicolas, III, qui fonde sa souveraineté temporelle sur la donation de Constantin, subsiste toujours, et Boniface VIII l’ayant insérée dans la sixième des décrétales, les catholiques ou du moins les papistes doivent la révérer, comme une loi perpétuelle et sacrée.

[3313] Je dois à Fleury (Hist. ecclés., t. XVIII, p. 306) un extrait de cet acte de d’autorité du peuple, qu’il a tiré des Annales ecclésiastiques d’Odericus Raynaldus, A. D. 1281, n° 14, 15.

[3314] Othon, évêque de Freysingen, a conservé ces lettres et ces discours (Fabricius, Bibliot. latin. med. et infim. œt. t. V, p. 186, 187). Othon était peut-être de tous les historiens celui qui pouvait se vanter de la plus haute naissance : il était fils de Léopold, marquis d’Autriche ; Agnès sa mère était fille de l’empereur Henri IV, et il était devenu frère et oncle de Conrad III et de Frédéric Ier. Il a laissé une chronique de son temps en sept livres, et une histoire de Gestis Frederici I, en deux livres ; ce dernier ouvrage se trouve dans le sixième volume des Historiens de Muratori.

[3315] Nous désirons, disaient les Romains ignorants, remettre l’empire in eum statum, quo fuit tempore Constantini et Justiniani, qui totum orbena vigore senatus et populi romani suis tenuere manibus.

[3316] Othon de Freysing., de Gestis Freder. I, l. I, c. p. 662-664.

[3317] Hospes eras, civem feci. Advena fuisti ex Transalpinis partibus, principem constitui.

[3318] Cicéron ou Tite-Live n’auraient pas rejeté ces images qu’employait un Barbare né et élevé dans la forêt Hercynienne.

[3319] Othon de Freysingen, qui connaissait sûrement le langage de la cour et de la diète d’Allemagne, parle des Francs du douzième siècle comme de la nation régnante (proceres Franci, equites Franci, manus Francorum) : il ajoute cependant l’épithète de Teutonici.

[3320] Othon de Freysingen, de Gestis Freder. I, l. II, c. 22, p. 720-723. Dans la traduction et l’abrégé de ces actes authentiques et originaux, je me suis permis quelques libertés, mais sans m’écarter du sens.

[3321] Muratori (Dissert. 26, t. II, p. 492) a tiré des Chroniques de Ricobaldo et de François Pépin ce fait curieux et les vers détestables qui accompagnèrent le présent :

Ave decus orbis, ave ! Victus tibi destinor, ave !

Currus ab Augusto Frederica Cæsare justo.

Vœ Mediolanum ! Jam sentis spernere vanum

Imperii vires, proprias tïbi tollere vires.

Ergo triumphorum urbs potes memor esse priorum

Quos tibi mittebant reges qui bella gerebant.

Voici maintenant un passage des Dissertations italiennes (t. I, p. 444) : Ne si dee tacere che nell’ anno 1727, una copia desso Carroccio in marmo dianzi ignoto si scopri nel Campidoglio, presso alle carceri di quel luogo, dove Sixto V l’avea fatto rinchiudere. Stava esso posto copra quatro colonne di marmo fino colla sequente inscrizione, etc., dont l’objet était le même que celui de l’ancienne inscription.

[3322] Muratori raconte, avec une érudition impartiale (Annal., t. X, XI, XII), le déclin des forces et de l’autorité des empereurs en Italie ; et les lecteurs peuvent rapprocher sa narration de l’Histoire des Allemands (t. III, IV) par Schmidt, qui a mérité l’estime de ses compatriotes.

[3323] Tibur nunc suburbanum, et æstivæ Prœneste deliciæ, nuncupatis in Capitolio votis petebantur. On peut lire avec plaisir le passage entier de Florus (l. I, c. 11), et il a obtenu les éloges d’un homme de génie (Œuvres de Montesquieu, t. III, p. 634, 635, édit. in-4°).

[3324] Ne a feritate Romanorum, sicut fuerant Hostienses, Portuenses, Tusculanenses, Albanenses, Labicenses, et nuper Tiburtini, destruerentur (Matthieu Paris, p. 757). Ces événements sont indiqués dans les Annales et l’Index de Muratori (dix-huitième volume).

[3325] Voyez le tableau animé que fait le P. Labat (Voyage en Espagne et en Italie) de l’état ou de la ruine de ces villes, qui sont, pour ainsi dire, les faubourgs de Rome ; ce qu’il dit des rives du Tibre, etc. Il avait résidé longtemps dans le voisinage de Rome. Voyez aussi une description plus exacte de cette ville que le P. Eschinard (Rome, 1750, in-8°) a ajoutée à la carte topographique de Cingolani.

[3326] Labat (t. III, p. 233) rapporte un décret rendu alors depuis peu par le gouvernement romain, et qui a cruellement mortifié l’orgueil et la pauvreté de Tivoli : In civitate Tiburtina non vivitur civiliter.

[3327] Je m’écarte de ma méthode ordinaire de ne citer que la date des Annales de Muratori, en considération de la sagesse avec laquelle il a pesé le témoignage de neuf auteurs contemporains sur la bataille de Tuscillum (t. X, p. 42-44).